Jane Evelyn Atwood. « Fascinée par les mondes clos »

Par Recueilli par Amandine Plougoulm

Certains parlent de photojournalisme, d'autres de clichés engagés. Mais Jane Evelyn Atwood, elle, elle « s'en fout ». La photographe américaine s'éloigne des catégories à mesure qu'elle se rapproche de ses sujets, fascinée par ces mondes clos qu'elle s'attache à décloisonner. Rencontre.

Née à New York, Jane Evelyn Atwood s'est installée en France dès 1971. La photographe de renommée internationale a l'habitude de mettre en page ses images : elle dédicacera ses livres, mardi prochain, à Librairies & Curiosités.
Née à New York, Jane Evelyn Atwood s'est installée en France dès 1971. La photographe de renommée internationale a l'habitude de mettre en page ses images : elle dédicacera ses livres, mardi prochain, à Librairies & Curiosités.


Pourquoi vous êtes-vous lancée dans la photographie ?
Après mes études de théâtre, je ne savais pas trop quoi faire. J'ai décidé d'aller vivre à Paris, je me suis dit qu'au moins, j'allais apprendre le français. J'ai acheté un Nikkormat : je ne connaissais rien à la photo, mais je voulais m'inspirer de Diane Arbus ! J'ai arpenté les galeries, j'ai fait tous les vernissages : je cherchais des gens intéressants, mais j'y ai rencontré tout le contraire. Jusqu'au jour où quelqu'un m'a parlé d'une prostituée de la rue des Lombards.

Votre premier projet photographique est né de cette rencontre avec Blondine, une prostituée parisienne ?
Oui, j'ignorais tout de ces femmes. J'étais curieuse, je voulais les comprendre. Toutes les nuits, pendant un an, je me suis rendue au 19, rue des Lombards. Blondine était une femme exceptionnelle, avec qui j'ai tissé une relation particulière. On venait d'un milieu tout à fait différent mais on avait une curiosité l'une pour l'autre.

Comment choisissez-vous vos thèmes ?
Avant tout projet photographique, il y a une curiosité. J'ai toujours été fascinée par les mondes clos. Ceux qu'on ne voit pas, qu'on n'entend pas. J'ai toujours su que je voulais travailler en prison, par exemple.

Vos sujets sont-ils sont parfois réticents à se laisser photographier ?
Presque tout le temps ! Pour mon projet sur les femmes en prison, c'était très difficile. Il fallait non seulement avoir l'autorisation de la prison, de l'État, mais ensuite, le plus dur restait à faire. Dans la prison de Rennes, j'ai été huée par les détenues, qui ont même été jusqu'à me menacer de mort.

Vous avez passé dix ans à arpenter les prisons. Entre l'instantanéité de la photo et ces longues années d'immersion. Quel est votre rapport au temps ?
Je donne au sujet le temps qu'il mérite. Mon projet ne se termine que lorsque j'ai des réponses à mes questions. Je ne sais jamais combien de temps ça va durer, mais ça se termine quand je me dis : « Ça y est, j'ai compris ». Et tout s'achève véritablement avec un livre, ou une exposition. Si mes photos restaient dans les tiroirs, je deviendrais dingue. Ce qui me sauve et me permet de fermer la parenthèse, c'est aussi qu'elles soient vues.

Paris Match a publié vos clichés de Jean-Louis, premier homme atteint du Sida à se laisser photographier pour la presse. C'était un acte militant ?
Oui, car à l'époque, en 1987, le climat était particulier. Il y avait beaucoup de paranoïa autour du Sida, mais aussi de honte et de peur. Je voulais informer sur cette maladie, aller à l'encontre des idées préconçues. Les personnes malades étaient marginalisées, je voulais montrer qu'elles n'étaient pas marginales. J'ai décidé de m'installer chez Jean-Louis et je l'ai photographié pendant quatre mois.

Quel est le dernier cliché que vous avez pris ?
C'était dans la médiathèque de Léchiagat, il y a quelques jours. J'ai pris en photo un tableau d'un bateau. J'adore ce que vous avez, en Bretagne. Je me dis que c'est peut-être mon côté celte, ma grand-mère maternelle était irlandaise. J'ai grandi à Cop Cade : c'est un peu la Bretagne des États-Unis !

Pratique
Rencontre dédicace avec Jane Evelyn Atwood, mardi 27 décembre, Librairie & Curiosités, de 17 h à 19 h.

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