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Festival photographique de La Gacilly : Des bêtes et des hommes

« Animals in the City », de Paras Chandaria.
« Animals in the City », de Paras Chandaria. © P. Chandaria
Corinne Thorillon , Mis à jour le

Le festival photographique de la cité bretonne met en relief jusqu’au 30 septembre la splendeur et la fragilité  du monde animal, dont les espèces sont plus menacées que jamais.

Une girafe majestueuse, encerclée par une jungle urbaine et comme perdue dans sa réserve naturelle de Nairobi, accueille les visiteurs sur le panneau géant qui surplombe la place de la Ferronnerie, transformée pour l’été en place aux palabres. Cette image du photographe Paras Chandaria est saisissante et donne le ton de cette 14e édition. L’Afrique, berceau de l’humanité, riche de ses ressources minières et de sa faune sauvage, subit de plein fouet le monde moderne. Il était donc naturel que le festival, qui arpente cette année ce continent, choisisse comme thématique environnementale la relation de l’homme à l’animal.

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« Flamants roses », de Joel Sartore.
« Flamants roses », de Joel Sartore. © J. Sartore/ National Geographic

Alors que les scientifiques annoncent la sixième extinction massive , l’Américain Joel Sartore, associé au « National Geographic », a pour ambition de recenser minutieusement les 12 000 espèces en danger. Son « Arche photographique », une chatoyante galerie de portraits d’animaux sauvages saisis sur fond blanc ou noir, est un travail de conservation fastidieux mais indispensable. Sans l’intensité des regards en gros plan ou les mouvements pris dans l’instant, on pourrait presque penser qu’il s’agit d’animaux empaillés comme les trophées exhibés fièrement par les chasseurs de David Chancellor. Ses clichés parfois dérangeants interrogent le rôle ambigu que cette communauté aux motivations étranges peut jouer dans la sauvegarde animale. Le photojournaliste Brent Stirton dénonce, quant à lui, le braconnage intensif qui sclérose le continent et nous livre des images insoutenables, prises au flash pour mieux souligner l’intensité dramatique des scènes, comme le cadavre de ce rhinocéros noir abattu pour sa corne alors qu’il se désaltérait. En Asie, l’ivoire, la corne de rhinocéros ou les os de tigre valent plus cher que l’or ou la cocaïne. Avec l’émergence de la classe moyenne chinoise, la demande explose et le trafic augmente, donnant lieu à une guerre invisible, la plus dangereuse au monde. Brent Stirton met ainsi en lumière la détermination des rangers qui tentent au péril de leur vie de lutter contre ce fléau et les moyens dérisoires dont ils disposent. Un constat implacable destiné à nous faire réagir et comprendre la difficulté des humains à cohabiter avec la faune sauvage.

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« Rupee, capucin à face blanche », de Tim Flach.
« Rupee, capucin à face blanche », de Tim Flach. © T. Flach.

Est-ce que finalement enfermer les animaux ne serait pas la solution pour mieux les préserver ? Cette question de la liberté est au centre de la démarche artistique d’Eric Pillot. Il met en scène sans trucage les animaux sauvages dans le décor artificiel des zoos et nous entraîne « in situ » de l’autre côté de la vitre, comme un miroir de nous-mêmes, avec une certaine mélancolie. La douceur qui se dégage néanmoins de ses clichés aux couleurs délavées ferait presque oublier que ces bêtes sont enfermées. Un parti pris qui contraste avec celui de Michel Vanden Eeckhoudt sur le même sujet. Pas de mise en scène chez le photographe belge, disparu en 2015, mais une mise en abîme frontale de la captivité avec des images percutantes en noir et blanc, qui nous font vivre une palette complète d’émotions et nous renvoient à notre destin commun.

« Flamant bleu », d’Eric Pillot.
« Flamant bleu », d’Eric Pillot. ©

Pour autant, le tableau n’est pas toujours sombre, et certaines expositions prêtent même à sourire. Comme « Le grand show des animaux de la ferme », du Canadien Rob McInnis, qui a saisi ces animaux domestiques comme des stars de cinéma, laissant apparaître chez eux un caractère humain souvent cocasse. Pour Tim Flach, ils peuvent parfois même être « Plus qu’humains ». Avec beaucoup d’humour, il nous fait découvrir ces bêtes d’un œil différent, transformant un coq en ballerine ou un singe capucin en addict du téléphone portable. Elliott Erwitt, fasciné par les chiens, nous livre une série de clichés amusants où le meilleur ami de l’homme est le sujet principal et son maître devient accessoire.
Qu’elles consternent, alarment ou amusent, ces expositions gratuites et en plein air valent vraiment le détour. Gageons que cette programmation exceptionnelle attirera une foule de visiteurs encore plus impressionnante que celle des 400 000 bipèdes de la précédente édition ! 

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Photo tirée de la série "Equus".
Photo tirée de la série "Equus". © Emanuele Scorcelletti
Coup de cœur

C’est assez rare pour le souligner, le festival soutient la création artistique. Pour marquer son extension territoriale, La Gacilly a donné carte blanche à deux auteurs qui mettent à l’honneur les villages qui viennent de fusionner avec la commune. Emmanuel Berthier a observé le « Réveil des marais » de Glénac, se mêlant aux pêcheurs dans la brume hivernale de ce site sauvage exceptionnel. Ses photos sont l’occasion d’une balade agréable au bord de l’eau, nous faisant voyager de l’hiver au printemps. Dans le même froid glacial, Emanuele Scorcelletti investissait La Chapelle-Gaceline, ce village qui vit à l’unisson avec les chevaux, les enfants allant encore en carriole à l’école. Le Franco-Italien s’est inspiré de l’univers de Fellini pour entraîner les habitants dans des tableaux burlesques et oniriques. « Equus » est une exposition unique et touchante qui rend hommage avec brio à la plus noble conquête de l’homme. 

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