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Photojournalisme : Véronique de Viguerie remporte le Visa d’or News à Perpignan

La reporter a été récompensée lors du festival international Visa pour l’image pour sa couverture de la guerre au Yémen.

Le Monde avec AFP

Publié le 09 septembre 2018 à 02h04, modifié le 10 septembre 2018 à 11h15

Temps de Lecture 3 min.

Les clichés de Véronique de Viguerie montrent un pays dévasté par les combats.

Première femme en vingt ans : la photographe française Véronique de Viguerie a remporté, samedi 9 septembre à Perpignan, le prix le plus prestigieux du festival international de photojournalisme Visa pour l’image pour sa couverture de la guerre au Yémen. « J’ai une pensée particulière pour les 30 millions de Yéménites qui vivent l’enfer chaque jour », a déclaré la lauréate, après avoir reçu la prestigieuse récompense.

Elle succède au Belge Laurent Van der Stockt, couronné pour sa couverture de la bataille de Mossoul (Irak) et à deux photographes de l’Agence France-Presse (AFP), le Grec Aris Messinis et le Turc Bulent Kiliç, pour leurs travaux sur la crise des migrants.

Il s’agit de la première femme à décrocher le Visa d’or Paris Match News depuis vingt ans, et seulement la cinquième depuis la première édition en 1989 de cette manifestation, présentée comme la plus importante consacrée au photojournalisme dans le monde. Interrogée par l’AFP sur cette première distinction d’une femme en deux décennies, elle a répondu : « Il était temps, et je suis encore plus fière»

Elle rejoint donc le club très fermé des autres femmes lauréates du Visa d’Or News : Nadia Benchallal (France, 1994), Carol Guzy (USA, 1995), Yunghi Kim (Corée du Sud, 1997) et Alexandra Boulat (France, 1998). Elle a également remporté le Visa d’or humanitaire du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

Les autres nominés étaient Khalil Hamra (Associated Press), né de parents palestiniens, avec « Pourquoi Gaza ? », l’Italien Emanuele Satolli (Time), déjà finaliste dans cette catégorie en 2017, avec « Gaza Border Killings », et Daniele Volpe, né en Italie, avec « Guatemala, le volcan de feu ».

Un reportage « compliqué à faire »

Agée de 40 ans, la lauréate qui se présente sur son compte Twitter comme « photoreporter de guerre, mère de deux enfants, blonde et pas stupide », a travaillé en Afghanistan pendant trois ans. Elle y avait réalisé son premier grand « coup » avec un reportage, qui avait fait polémique à l’époque, sur le commando taliban ayant tué le 18 août 2008 dix soldats français.

Les clichés très forts de son exposition « Yémen : la guerre qu’on nous cache » montrent un pays dévasté par des combats ayant déjà fait plus de 10 000 morts et en proie à la plus grave crise humanitaire actuelle : bâtiments en ruine, nourrissons squelettiques, enfants dans la rue avec une kalachnikov, etc.

« C’était un reportage [pour Paris Match et Time] très compliqué à faire, une guerre dont personne ne parle. Accéder au Nord Yémen, ce n’est pas impossible mais presque. Cela nous a pris un an [pour avoir toutes les autorisations] », explique-t-elle lors d’un entretien avec l’AFP avant la remise du prix. Et puis, il a fallu « travailler avec les [rebelles] houthistes, puis sans les houthistes. Et ensuite repartir, cela a été très compliqué. » Avec sa consœur rédactrice, la photographe se déplaçait en abaya (robe musulmane) avec un voile sur le visage : « On a caché tous les signes montrant que nous étions occidentales. Et comme à tous les check-points, ils [les combattants] ne parlent jamais aux femmes, on n’a pas eu besoin de parler, c’était très pratique. »

« Est-ce qu’on a besoin d’être un homme pour faire ce métier ? Certainement pas. »

Interrogée sur le photojournalisme, dans lequel les hommes sont encore largement majoritaires, elle a répondu : « Est-ce qu’on a besoin d’être un homme pour faire ce métier ? Certainement pas. Est-ce un avantage d’être une femme dans certains pays comme le Yémen ? Evidemment, car on a accès aux femmes et on peut se cacher sous une abaya, ou une burqa en Afghanistan, et c’est très pratique. »

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« On est la première génération à revendiquer le droit d’être [photo] reporter mais aussi d’être une femme. Moi, je suis maman de deux petites filles », poursuit-elle. Mais il y a encore des progrès à faire : « Chez certains [collègues masculins], on dirait que le fait d’avoir des femmes reporters qui partent à la guerre leur enlève un peu de leurs attributs. A-t-on besoin d’avoir ses attributs masculins pour partir à la guerre ? Je ne pense pas. »

Parmi les autres lauréats 2018, figurent les photographes James Oatway (Visa d’or région Occitanie), Sergey Ponomarev (Visa d’or presse quotidienne), Sabine Weiss (Visa d’or d’honneur du Figaro Magazine), Valentine Van Vyve et Olivier Papegnies (Visa d’or de l’information numérique).

Laura Morton a, pour sa part, remporté le prix Canon de la femme photojournaliste, Marco Zorzanello, celui de la Fondation Yves Rocher. Luis Tato (AFP) a remporté le prix de la ville de Perpignan Rémi Ochlik, du nom d’un photographe tué en 2012 en Syrie. Jérome Sessini est le lauréat du prix Pierre et Alexandre Boulat et Kasia Strek gagne le prix Camille Lepage.

  • Bobby Sands – Belfast, mai 1981, par Yan Morvan. Il y a vingt ans, le 10 avril 1998, catholiques et protestants irlandais signaient l’accord du « Vendredi saint », étape capitale vers la paix, après un conflit de presque trente ans, qui avait fait plus de 3 500 morts. Le photographe Yan Morvan est l’un des nombreux journalistes qui ont documenté ces affrontements. En 1981, il a réalisé une série de clichés dans lesquels il est parvenu à capter l’atmosphère révolutionnaire des quartiers catholiques de Belfast, qui s’étaient embrasés après le décès du prisonnier Robert Gerard Sands le 5 mai. Bobby Sands, comme il était surnommé, était une figure de l’Armée républicaine irlandaise (IRA). Engagé dans une grève de la faim, le militant a succombé au bout de soixante-six jours dans la prison de Maze, devenant un héros de la cause républicaine.

    La 30e édition du festival international de photojournalisme ouvre ses portes samedi 1er septembre, à Perpignan. En préambule, « M Le magazine du Monde » dévoile sept clichés issus de sept reportages présentés au festival.

    Bobby Sands – Belfast, mai 1981, par Yan Morvan. Il y a vingt ans, le 10 avril 1998, catholiques et protestants irlandais signaient l’accord du « Vendredi saint », étape capitale vers la paix, après un conflit de presque trente ans, qui avait fait plus de 3 500 morts. Le photographe Yan Morvan est l’un des nombreux journalistes qui ont documenté ces affrontements. En 1981, il a réalisé une série de clichés dans lesquels il est parvenu à capter l’atmosphère révolutionnaire des quartiers catholiques de Belfast, qui s’étaient embrasés après le décès du prisonnier Robert Gerard Sands le 5 mai. Bobby Sands, comme il était surnommé, était une figure de l’Armée républicaine irlandaise (IRA). Engagé dans une grève de la faim, le militant a succombé au bout de soixante-six jours dans la prison de Maze, devenant un héros de la cause républicaine. YAN MORVAN

  • A Potosí, en Bolivie, les mineurs du Cerro Rico (la « colline riche » en espagnol) travaillent dans des conditions intenables. Ils sont pourtant des milliers à braver le danger pour explorer la plus grande mine d’argent du monde, dans l’espoir d’une vie meilleure. Le photographe Miquel Dewever-Plana s’est penché, pendant neuf mois, sur leur travail quotidien et sur l’importance de leurs croyances. Ici, des mineurs préparent le carnaval. Les vierges et les croix, à l’entrée des mines, sont censées marquer la frontière entre le monde des saints et de Dieu, à la surface, et le monde souterrain, gouverné par le diable.

    Bolivie : Pour tout l’argent de Potosí, par Miquel Dewever-Plana

    A Potosí, en Bolivie, les mineurs du Cerro Rico (la « colline riche » en espagnol) travaillent dans des conditions intenables. Ils sont pourtant des milliers à braver le danger pour explorer la plus grande mine d’argent du monde, dans l’espoir d’une vie meilleure. Le photographe Miquel Dewever-Plana s’est penché, pendant neuf mois, sur leur travail quotidien et sur l’importance de leurs croyances. Ici, des mineurs préparent le carnaval. Les vierges et les croix, à l’entrée des mines, sont censées marquer la frontière entre le monde des saints et de Dieu, à la surface, et le monde souterrain, gouverné par le diable. MIQUEL DEWEVER-PLANA

  • Des réfugiés, épuisés après leur voyage, sur une plage au bord du fleuve Naf, qui marque la frontière entre la Birmanie et le Bangladesh. La traversée de ce fleuve est l’une des voies utilisées par les musulmans rohingya, qui fuient les persécutions dans leurs villages de Birmanie. Le photographe Kevin Frayer a séjourné deux fois au Bangladesh pour documenter cet exode forcé. Dans sa série de clichés, il a voulu mettre l’accent sur des histoires personnelles et sur la fatigue qu’engendrent d’aussi longs déplacements, qui ne sont pas la fin des ennuis pour les réfugiés. A l’arrivée dans les camps, la malnutrition, le choléra et d’autres maladies souvent mortelles les attendent.

    Voyage du désespoir : l’exode des Rohingya, par Kevin Frayer

    Des réfugiés, épuisés après leur voyage, sur une plage au bord du fleuve Naf, qui marque la frontière entre la Birmanie et le Bangladesh. La traversée de ce fleuve est l’une des voies utilisées par les musulmans rohingya, qui fuient les persécutions dans leurs villages de Birmanie. Le photographe Kevin Frayer a séjourné deux fois au Bangladesh pour documenter cet exode forcé. Dans sa série de clichés, il a voulu mettre l’accent sur des histoires personnelles et sur la fatigue qu’engendrent d’aussi longs déplacements, qui ne sont pas la fin des ennuis pour les réfugiés. A l’arrivée dans les camps, la malnutrition, le choléra et d’autres maladies souvent mortelles les attendent. KEVIN FRAYER/GETTY IMAGES/AFP

  • Une jeune femme, dans une ruelle d’Haïti. Dans ce pays détruit par un séisme en 2010, la défécation en plein air est une pratique courante. Les eaux souillées des ruelles inondées transportent et répandent des maladies parfois mortelles, comme le choléra. Une situation qui n’a fait qu’empirer après le passage de l’ouragan Matthew, en 2016. Pour les femmes, ce moment de la journée est aussi celui où elles sont le plus vulnérables : seules dans des endroits retirés, elles sont exposées à d’importants risques d’agressions sexuelles. La photographe américaine Andrea Bruce s’est penchée sur ce sujet épineux dans une série de reportages, également réalisés en Inde et au Vietnam, où ce problème sanitaire est aussi un fléau.

    Un petit coin : défécation en plein air et assainissement, par Andrea Bruce

    Une jeune femme, dans une ruelle d’Haïti. Dans ce pays détruit par un séisme en 2010, la défécation en plein air est une pratique courante. Les eaux souillées des ruelles inondées transportent et répandent des maladies parfois mortelles, comme le choléra. Une situation qui n’a fait qu’empirer après le passage de l’ouragan Matthew, en 2016. Pour les femmes, ce moment de la journée est aussi celui où elles sont le plus vulnérables : seules dans des endroits retirés, elles sont exposées à d’importants risques d’agressions sexuelles. La photographe américaine Andrea Bruce s’est penchée sur ce sujet épineux dans une série de reportages, également réalisés en Inde et au Vietnam, où ce problème sanitaire est aussi un fléau. ANDREA BRUCE

  • A Evaton, cité démunie au Sud de Johannesburg, une femme vient de se faire expulser de son lieu de résidence. En Afrique du Sud, les agents de la société de sécurité privée Red Ants (« fourmis rouges ») n’hésitent pas à employer la force contre les occupants illégaux de bâtiments, au nom de propriétaires privés ou de collectivités locales. En documentant ces interventions musclées, le photographe sud-africain James Oatway brosse le portrait de la brigade redoutée et met le doigt sur un conflit persistant : celui qui oppose les riches propriétaires aux citoyens démunis. La situation de l’Etat, incapable de faire régner la loi, ni de répondre aux besoins de logement des habitants, témoigne de la fracture sociale qui divise la « nation arc-en-ciel ».

    Les Fourmis rouges, par James Oatway

    A Evaton, cité démunie au Sud de Johannesburg, une femme vient de se faire expulser de son lieu de résidence. En Afrique du Sud, les agents de la société de sécurité privée Red Ants (« fourmis rouges ») n’hésitent pas à employer la force contre les occupants illégaux de bâtiments, au nom de propriétaires privés ou de collectivités locales. En documentant ces interventions musclées, le photographe sud-africain James Oatway brosse le portrait de la brigade redoutée et met le doigt sur un conflit persistant : celui qui oppose les riches propriétaires aux citoyens démunis. La situation de l’Etat, incapable de faire régner la loi, ni de répondre aux besoins de logement des habitants, témoigne de la fracture sociale qui divise la « nation arc-en-ciel ». JAMES OATWAY

  • Le canal qui se jette dans la rivière Buriganga, à Dacca, au Bangladesh, n’est plus qu’un amoncellement de déchets qui empêchent l’eau de couler. Cette rivière, qui se meurt, compte parmi les plus polluées au monde. Les ateliers de confection installés sur les rives déversent chaque jour de grandes quantités de produits chimiques et de détritus. En suivant les cinq cours d’eau qui encerclent la capitale bangladaise, le photographe Gaël Turine a documenté les conséquences de l’industrialisation massive dans cette ville. Un désastre écologique qui s’explique par l’explosion démographique, la corruption et la misère.

    Rivières blessées, par Gaël Turine

    Le canal qui se jette dans la rivière Buriganga, à Dacca, au Bangladesh, n’est plus qu’un amoncellement de déchets qui empêchent l’eau de couler. Cette rivière, qui se meurt, compte parmi les plus polluées au monde. Les ateliers de confection installés sur les rives déversent chaque jour de grandes quantités de produits chimiques et de détritus. En suivant les cinq cours d’eau qui encerclent la capitale bangladaise, le photographe Gaël Turine a documenté les conséquences de l’industrialisation massive dans cette ville. Un désastre écologique qui s’explique par l’explosion démographique, la corruption et la misère. GAËL TURINE

  • Voici deux ans que l’accord de paix entre le gouvernement et le groupe des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) a été signé. Et les anciens combattants réapprennent les gestes du quotidien dans des camps de transition. Petit à petit, ils renouent avec leurs proches et tentent de se réinsérer dans la société pour mener une vie ordinaire. Une renaissance que la photographe Catalina Martin-Chico – lauréate du prix Canon de la Femme photojournaliste 2017 – a choisi d’illustrer par celles qui l’incarnent le mieux : les femmes. Depuis cinquante-trois ans, être guérillera et devenir mère était incompatible. Certaines ont été contraintes à l’avortement, d’autres ont dû abandonner leurs enfants. Elles sont des centaines à avoir accouché depuis qu’elles ont rendu les armes. Un baby-boom qui donne l’espoir d’un nouveau départ à la Colombie.

    Colombie : (Re)Naître, par Catalina Martin-Chico

    Voici deux ans que l’accord de paix entre le gouvernement et le groupe des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) a été signé. Et les anciens combattants réapprennent les gestes du quotidien dans des camps de transition. Petit à petit, ils renouent avec leurs proches et tentent de se réinsérer dans la société pour mener une vie ordinaire. Une renaissance que la photographe Catalina Martin-Chico – lauréate du prix Canon de la Femme photojournaliste 2017 – a choisi d’illustrer par celles qui l’incarnent le mieux : les femmes. Depuis cinquante-trois ans, être guérillera et devenir mère était incompatible. Certaines ont été contraintes à l’avortement, d’autres ont dû abandonner leurs enfants. Elles sont des centaines à avoir accouché depuis qu’elles ont rendu les armes. Un baby-boom qui donne l’espoir d’un nouveau départ à la Colombie. CATALINA MARTIN-CHICO

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