Vingt-deux ans après sa création, la Maison européenne de la photographie (MEP) change d’ère : depuis sa fondation en 1996, l’équipe à la tête de l’institution parisienne n’avait pas bougé. Après le président historique, Henry Chapier, remplacé en décembre 2017 par Jean-François Dubos, le nom du nouveau directeur a été révélé : Simon Baker, jusqu’alors conservateur en chef pour la photographie et la création internationale à la Tate Modern de Londres remplacera Jean-Luc Monterosso, qui part à la retraite en mars.
Lancée par une association soutenue par la Mairie de Paris, la MEP est devenue, au fil des ans, un lieu d’exposition incontournable pour la photographie et la propriétaire d’une collection d’ampleur. De quoi attirer des pointures venues d’institutions vénérables, comme Simon Baker. Barbe rousse et manières discrètes, ce Britannique de 44 ans s’est fait connaître en 2009 lorsqu’il est devenu le premier conservateur chargé de la photographie à la Tate. Un rôle immense dans ce musée venu très tard à la photographie, et dont la maigre collection d’images se résumait aux artistes plasticiens ou conceptuels.
La photo et les autres arts
Formé à l’histoire de l’art et auteur d’une thèse sur le surréalisme, Simon Baker occupait, avant son recrutement à la Tate, le poste de professeur associé à l’université de Nottingham. A la Tate, il a choisi de concentrer la collection de photographies sur l’après-guerre, embrassant plusieurs continents, et l’a particulièrement axée sur la photographie japonaise. Il y a organisé une exposition sur le duo William Klein-Daido Moriyama, en 2012, ainsi que des présentations thématiques liées au statut de l’image contemporaine, comme la surveillance (« Exposed », en 2010) ou la mise en scène de soi (« Performing for the Camera », en 2016).
Il a aussi beaucoup mis l’accent sur les livres, secteur en pleine effervescence : depuis 2015, le Turbine Hall de la Tate Modern accueille le festival Offprint, dédié aux livres d’art, et l’institution londonienne a acquis récemment l’immense collection (12 000 ouvrages) du photographe et collectionneur britannique Martin Parr.
En France, Simon Baker a déjà organisé plusieurs expositions au festival des Rencontres d’Arles, toutes liées à la photographie japonaise, sa grande passion : « Another Language », en 2015, qui rassemblait les travaux de huit photographes nippons, et, en 2017, une rétrospective de l’œuvre du Japonais Masahisa Fukase.
Le nouveau directeur veut mettre l’accent sur le fond de la MEP, et en particulier le bel ensemble de photos japonaises
Joint par téléphone, le nouveau directeur s’est dit « très excité » à l’idée de passer d’un musée national, mêlant tous les arts, à un lieu dédié seulement à la photographie et voué à accueillir aussi bien de grandes expositions que des présentations plus modestes.
Pour sa programmation, qui débutera en 2019, il a annoncé vouloir d’abord mettre l’accent sur la grande collection de photos de la MEP, et en particulier le bel ensemble de photos japonaises, dont une partie avait été exposée à l’été 2017. Il a aussi déclaré vouloir poursuivre la mission d’origine de l’institution en exposant l’œuvre de photographes français et européens, en ouvrant largement ses portes aux jeunes artistes et en continuant d’accueillir de la photo de mode.
Quand on lui fait remarquer l’ironie de sa nomination dans cette maison européenne à l’heure du Brexit, le Britannique affirme qu’il se sentira, à la MEP, « encore plus européen »… avec sans doute juste une pointe d’accent japonais.
Sur le Web : www.mep-fr.org
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