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Les journaux doivent-ils demander des autorisations quand ils publient des photos de manifestants ?

Un internaute nous a interpellé suite à la «Une» de Libé du 6 décembre, montrant des personnes clairement identifiables dans le cortège parisien contre la réforme des retraites.
par Cédric Mathiot
publié le 7 décembre 2019 à 8h44

Bonjour,

Un internaute a saisi CheckNews sur Twitter, à propos de la photo de une de Libé ce vendredi, illustrant le succès de la mobilisation du 5 décembre contre la réforme des retraites. Sur ce cliché de Stéphane Lagoutte, pris dans le cortège parisien, on distingue nettement les visages des personnes au premier plan. D'où la question posée : « Toutes ces personnes ont-elles donné leur accord ? Comment est géré le droit à l'image dans le cas des grands rassemblements ?»

Votre question renvoie à l'affrontement de deux droits : le droit à l'information et le droit à l'image. Le droit à l'image est lié au droit du respect de la vie privée. Ainsi, comme l'indique le site servicepublic.fr, il est en théorie nécessaire d'avoir l'accord écrit d'une personne pour utiliser son image.

Toutefois, la diffusion de certaines images ne nécessite pas l’accord de la personne photographiée ou filmée, sous réserve du respect de sa dignité. C’est le cas pour une image d’un groupe ou d’une scène de rue dans un lieu public si aucune personne n’est individualisée et dans la limite du droit à l’information ; pour une image d’un événement d’actualité ou d’une manifestation publique dans la limite du droit à l’information et à la création artistique ; pour une image d’une personnalité publique dans l’exercice de ses fonctions si le but de l’image est d’informer (un élu par exemple) ou enfin pour une image illustrant un sujet historique.

Dans le cas qui nous intéresse − une manifestation, donc −, «une photographie peut donc être publiée sans l'autorisation des personnes à condition de ne pas dépasser les limites du droit à l'information, résume Emmanuel Soussen, l'avocat de Libération. Ce principe a été clairement posé par les tribunaux : si l'autorisation devait être systématique, toute publication de photo de foule ou manifestation publique pour illustrer un reportage serait impossible».

La Cour de cassation avait par exemple estimé en 2003, à propos d'une photo publiée par le Nouvel Observateur en 1998 au cours d'une manif contre le PACS, que la photographie, prise en relation directe avec l'article publié et dont le commentaire est également en relation directe avec cet événement, ne portait pas atteinte au droit à l'image des personnes représentées.

Cordialement

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