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Orphelinats, sex-clubs désertés... Les lieux oubliés dans l'objectif de l'urbex

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INTERVIEW - Le jeune photographe Maxime Sirugue pratiquait à la fois l'urban climbing et l'urbex. Deux semaines après sa mort dans l'exercice de sa passion, Le Figaro a rencontré Raphael, adepte de cette nouvelle exploration urbaine. Il raconte sa démarche.

La mort à 18 ans de Maxime Sirugue dans l'exercice de sa passion, l'urban climbing, jette une lumière crue sur les multiples facettes de la photographie de l'extrême. Comme l'urbex (abréviation de urban exploration pour exploration urbaine). Une discipline à sensations.

Sur les photos à l'objectif Grand Angle qu'ils publient sur leur site, Raphael et Marie posent cachés derrière des masques de lapins. En arrière-plan, d'immenses architectures en ruine, bien souvent reprises à l'homme par la nature, confèrent au cliché un cachet inquiétant. Certains détails, également, frappent. Une paire de pantoufle parfaitement alignée devant le fauteuil orthopédique d'une maison de retraite abandonnée, des graffitis étranges sur les murs lépreux d'un ancien asile psychiatrique...

Le couple trentenaire pratique l'urbex depuis quatre ans. L'idée? Découvrir les lieux insolites désertés. Le tandem retranscrit ses explorations sur le site Urbex Session: An Abandoned World, le premier en France sur le sujet, en essayant de dépeindre des histoires bien réelles -entre reportage et exercice littéraire. Avec près de 500 «découvertes» à leur actif, Raphael et Marie ont sillonné une bonne partie de l'Europe, et revendiquent une authentique démarche artistique et underground.

LE FIGARO. - Comment définiriez-vous l'urbex?

Raphael. - C'est l'exploration des lieux abandonnés, des choses oubliées, interdites. Presque un hommage à ces tableaux vivants qui disparaîtront un jour. J'y vois aussi une forme de tourisme underground, me faisant voyager dans des endroits comme Niort ou Melun, qui au premier abord ne représentent pas mes premières destinations favorites de vacances!

Qu'est-ce qui vous attire dans cette pratique?

Il y a bien sûr cette idée de transgression, de “secret à déchiffrer”, qui attire notamment beaucoup de jeunes. Mais nous sommes surtout intéressés par la démarche artistique que cela implique. Mes deux hobbies sont la photographie et l'écriture, que je retrouve parfaitement avec l'urbex. Il y a plus de travail en amont que de prise de risque: il faut trouver le lieu, faire une recherche historique avec une documentation précise (des vues satellites, des archives, d'anciennes cartes postales, ...). Une fois la visite terminée, nous romançons l'histoire du lieu en ajoutant de nombreuses photos. À partir de là, l'imagination du lecteur peut facilement se mettre en place...

Urbex Session : An Abandoned World

Existe-t-il des règles? Comme l'anonymat que vous tenez à préserver?

(Rires) Non, les masques de lapin ne sont pas obligatoires! C'est simplement pour ne pas démystifier les lieux. La pratique n'est pas institutionnalisée, les règles à suivre sont donc de simples règles de vie: respecter l'endroit, ne pas laisser de traces, salir ou voler. Il y a un parallèle dangereux entre un lieu délaissé et un lieu abandonné. Les urbexeurs ne peuvent pas s'en emparer comme ça. Il y a d'ailleurs eu malheureusement quelques drames (le jeune Maxime Sirugue, décédé à 18 ans, pratiquait l'urbex et l'urban climbing, NDLR).

« Au sous-sol, nous sommes tombés sur des têtes de chiens conservées dans des bocaux »

Raphael, urbexeur

Quelles infrastructures sont le plus à même d'avoir été délaissées?

Une infinité. Les sanatoriums, les lieux de culte, les orphelinats, les asiles psychiatriques, les usines, les vieux châteaux, mais également des cinémas, des aquariums ou des sex-clubs laissés à l'abandon, comme des carcasses d'avion ou de bateau... On trouve parfois carrément des villes fantômes. Toutes ces infrastructures ont un potentiel esthétique -et romanesque- très fort, et font susciter diverses émotions. Cela a été le cas avec le Big World Land, un ancien parc d'attractions en Suède dédié à Paris. On pouvait imaginer les cris d'enfants dans un silence assourdissant. J'ai aussi le souvenir d'une école vétérinaire terrifiante en Belgique. Au sous-sol, nous sommes tombés sur des têtes de chiens conservées dans des bocaux remplis de formol. Nous prenions les photos en fermant les yeux...

Urbex Session : An Abandoned World

Un lieu, en particulier, vous a laissé un souvenir marquant?

La maison du pédophile condamné Marc Dutroux, abandonnée depuis 1996... Nous avions appris sur internet que son domicile principal était toujours libre d'accès en Belgique. Comme j'aime les faits divers, et l'esprit de «thriller» qui souvent s'en dégage, nous n'avons pas hésité une seconde. Cela ressemblait à un travail d'investigation journalistique: découvrir la psychologie du personnage en fonction de son environnement. La maison se trouvait au milieu d'une place de village, à côté d'un PMU. La porte était ouverte, et pas grand-chose n'avait bougé. Il y avait des factures, des jouets d'enfant, une valise au nom de son fils... Se dégageait de la maison une atmosphère indescriptible, qui nous mettait très mal à l'aise.

Orphelinats, sex-clubs désertés... Les lieux oubliés dans l'objectif de l'urbex

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8 commentaires
  • mysticlady2

    le

    Je ne demande pas , je supplie , j'implore le retrait de la photo du chat

  • laly8464

    le

    J adore!
    Fascinants, poétiques et humains

  • Tartufflette

    le

    Ca fait bien longtemps que Detroit ou Tchernobyl sont les terrains de jeu des explorateurs de lieux abandonnes !

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