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Planche(s) Contact 2019 : 5 séries photo à découvrir à Deauville, entre sable et bitume

Planche(s) Contact 2019 : 5 séries photo à découvrir à Deauville, entre sable et bitume

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© Chau-Cuong Lê

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Par Lise Lanot

Publié le

Venus en résidence, différents artistes proposent leur vision d'une même ville à travers des écritures photo différentes.

Jusqu’au 5 janvier 2020, la plage, le centre-ville, les espaces publics et certains des monuments phares de Deauville deviennent des lieux d’exposition accueillant une myriade de propositions photographiques autour de cette ville normande du bord de mer.

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“Standing at the sea, standing on the beach”, 2019. (© Chau-Cuong Lê)

Plantées dans le sable ou accrochées à l’intérieur d’un luxueux hôtel, les séries présentées sont le produit de la représentation que se font divers·es photographes de cette ville particulière, entre bocage normand, courses hippiques et lieu de villégiature pour personnes fortunées. Afin d’y voir plus clair au milieu des centaines de clichés exposés à travers la ville, nous avons sélectionné cinq projets particulièrement audacieux, drôles et émouvants.

Chau-Cuong Lê met en scène une jeunesse fantasmée

“Standing at the sea, standing on the beach”, 2019. (© Chau-Cuong Lê)

Chau-Cuong Lê fait partie des cinq artistes invité·e·s à participer au tremplin Jeunes talents du festival – et c’est d’ailleurs sa série Staring at the sea, standing on the beach, focalisée sur la jeunesse deauvillaise, qui a remporté le premier prix.

Portraitiste et habitué du thème de la jeunesse, Chau-Cuong Lê avoue ne pas être arrivé en résidence avec une idée précise en tête. En effet, chaque photographe était invité·e à passer trois semaines dans la ville pour créer son projet à trois mois d’intervalle, en mars, mai et juin

“Standing at the sea, standing on the beach”, 2019. (© Chau-Cuong Lê)

C’est pendant son travail de repérage, en basse saison, qu’il s’est rendu compte qu’il n’y avait pas grand-chose à faire dans cette ville maritime : que peuvent donc bien y faire les jeunes qui y habitent toute l’année ?

En traînant autour d’un terrain de basket, il a rencontré des jeunes qu’il a mis en scène dans un projet autour d’une “jeunesse fantasmée”, “ce que [lui aurait] pu vivre” là-bas et de l’idée qu’il se fait de leur vie dans l’attente. Ses monochromes et tirages couleur, arrangés en collages et triptyques, rendent compte d’un désœuvrement adolescent, entre rire et ennui, banalité et excentricité.

“Standing at the sea, standing on the beach”, 2019. (© Chau-Cuong Lê)

Abdoulaye Barry explore le lien entre la mer et les hommes

“Entre les hommes et la mer”, 2019. (© Abdoulaye Barry)

Abdoulaye Barry est originaire de N’Djamena, la capitale du Tchad. Dans son pays sans accès à la mer, il avait mené un projet autour du lac Tchad. À Deauville, le photographe a voulu poursuivre son projet autour de l’eau, lui qui n’avait jamais vu la mer.

Pendant sa résidence, il a intégré une équipe de pêcheurs, à bord d’un chalutier, afin de sonder “les liens qu’entretiennent les hommes avec la mer”. Son aventure maritime était “pleine d’émotions” et d’apprentissage, confie-t-il, notamment parce qu’il a dû “photographier avec le mal de mer, avec beaucoup de mouvements”.

Les images d’Abdoulaye Barry nous font entrer dans l’intimité de l’étroite relation entretenue par ceux qui donnent leur vie à la mer. L’éclat des vagues, les lumières du ciel… Depuis le bateau, le photographe est parvenu à capter ce monde à part, coincé entre l’infiniment petit de la cabine et l’infiniment grand de la mer. 

“Entre les hommes et la mer”, 2019. (© Abdoulaye Barry)

“Entre les hommes et la mer”, 2019. (© Abdoulaye Barry)

“Entre les hommes et la mer”, 2019. (© Abdoulaye Barry)

Larry Fink et ses monochromes délicats

“Liberty and Hoofbeats”, 2019. (© Larry Fink)

Quand on demande à Larry Fink, 78 ans, de parler de son expérience à Deauville, il hennit. Une fois, deux fois, puis trois fois. “J’aurais aimé savoir ce que ça faisait de devenir un cheval”, finit-il par sortir. Le photographe a décidé de se concentrer, lors de ses séjours deauvillais, sur le monde hippique :

“Malheureusement, quand je suis venu en juin, il n’y avait pas d’événements hippiques, pas de vente, pas de polo ni de grands prix… Donc les aspects de compétition et de capitalisme n’étaient pas présents alors que c’est ce qui m’intéresse.

Je suis allé dans l’étable Van der Bilt, je me suis allongé dans le lit dans lequel la reine a dormi et j’ai senti la royauté me chatouiller le cul”, se gausse-t-il.

“Liberty and Hoofbeats”, 2019. (© Larry Fink)

Fier d’être “le plus vieux du festival et sûrement le plus absurde”, il avoue aimer créer de l’espièglerie. Dans la lignée des grandes photographes américaines du XXe siècle, à la Lisette Model, Diane Arbus ou Mary Ellen Mark, il apporte un soin tout particulier au cadrage, à la composition et à la recherche du bizarre. Ses monochromes sont tous créés grâce à son petit appareil, fidèlement accroché autour de son cou, un Sony RX100.

“Liberty and Hoofbeats”, 2019. (© Larry Fink)

“Liberty and Hoofbeats”, 2019. (© Larry Fink)

Riverboom crée une compétition entre Deauville et Trouville

“Et au milieu coule la rivière”, 2019. (© Riverboom/Photo : Lise Lanot/Cheese)

Le collectif de reporters de guerre Riverboom raconte avec beaucoup d’humour que lorsque Deauville les a invités à participer au festival, ils ont cru “qu’il y avait une guerre, mais non, rien : c’était trop beau, que des grands hôtels, des Ferrari, rien pour [eux]”.

Lors de leur première semaine de résidence, ils ont traversé la Touques, le fleuve qui sépare Deauville de sa sœur Trouville. Ce fut la révélation. Sans arme, ni sang, ils ont trouvé la confrontation autour de laquelle tourne leur projet Et au milieu coule la rivière.

Amusé par l’idée “qu’on déteste toujours son voisin”, le collectif a imaginé des diptyques thématiques “sans mises en scène, avec que des gens réels” qui opposent Deauville la clinquante et Trouville la populaire.

“Et au milieu coule la rivière”, 2019. (© Riverboom/Photo : Lise Lanot/Cheese)

“Et au milieu coule la rivière”, 2019. (© Riverboom/Photo : Lise Lanot/Cheese)

Koto Bolofo rend hommage à la lumière de la mer

© Koto Bolofo

Pour sa dixième édition, Planche(s) Contact a invité le photographe de mode Koto Bolofo à investir sa plage. Face à la mer, des grands formats issus de séries réalisées sur les plages deauvillaises pour des éditos mode il y a quelques années.

Cette expo rétrospective permet de saisir l’amplitude du travail de Koto Bolofo, son “côté poétique” autant que son “côté fantasque”, qui s’exprime par exemple lorsqu’il fait venir des zèbres sur la plage normande parce qu’après tout, “pourquoi mettre un cheval quand on peut mettre un zèbre ?” 

© Koto Bolofo/Photo : Lise Lanot/Cheese

Cela fait trente ans que le photographe roule sa bosse dans le domaine de la photographie de mode mais il assure que c’est à Deauville qu’il a “pris [ses] racines et [sa] passion pour la photo de bord mer grâce à la lumière d’ici”.

Devant ses images, il se remémore avec facétie que les shootings pour maillots de bain auxquels il a participé ici se déroulaient toujours à la fin de l’automne. Pour lui, depuis, “la photo à Deauville est synonyme de combat contre les éléments”. Disposées face à la mer, ses images resplendissent d’autant plus. “Thank you Deauville”, sourit Koto Bolofo, son parapluie canard à la main.

© Koto Bolofo/Photo : Lise Lanot/Cheese

© Koto Bolofo/Photo : Lise Lanot/Cheese

À lire également -> À Deauville, le festival photo Planche(s) Contact ouvre ses portes ce week-end

Les séries photos exposées à l’occasion de Planche(s) Contact, le festival de créations photographiques de Deauville, sont visibles jusqu’au 5 janvier 2020.

Konbini, partenaire de Planche(s) Contact.