Artist and female art gallery owner talking about his art work. Shot indoors in a real gallery with artwork at the walls. Shot from behind.

En matière d'art, bien acheter, c'est avant tout une affaire de goût !

Getty Images

Au fil des ans, la photographie est devenue un secteur à part entière de l'art. Des musées lui sont consacrés, des galeries spécialisées se sont ouvertes dans le monde entier et des vacations sont organisées régulièrement par les grandes maisons de ventes.

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Nombre de manifestations ont aussi lieu, notamment les incontournables salons Paris Photo et Fotofever en novembre ou, désormais, le Mois de la Photo-Off en avril prochain, tous les trois à Paris.

Côté collectionneurs, la demande est forte. Mais la richesse de l'offre a de quoi dérouter l'amateur débutant, d'autant plus que la gamme de prix est très large.

S'il est aisé de trouver de belles épreuves pour moins de 1 000 euros, certaines signatures, comme l'Américaine Cindy Sherman (née en 1954), atteignent plusieurs millions d'euros.

Alors, est-il possible de collectionner sans se ruiner ? Peut-on se faire plaisir tout en espérant, en cas de revente, réaliser une plus-value ou, plus modestement, ne pas perdre d'argent ? Surtout, que faut-il privilégier ?

Pour répondre à vos interrogations, nous avons sollicité les conseils d'experts incontestés : la spécialiste photo d'une grande maison de ventes, la directrice de Fotofever, un couple de galeristes et une collectionneuse aguerrie. Sans oublier de vous donner nos propres coups de coeur car, en matière d'art, bien acheter, c'est avant tout une affaire de goût !

"La pire erreur : investir en suivant les règles de la Bourse"

Philippe et Marion Jacquier, créateurs de la galerie Lumière des roses

"Ni la taille ni la signature ne sont importantes, c'est la beauté de l'image qui compte", déclarent Philippe et Marion Jacquier qui supervisent la seule galerie au monde spécialisée dans la photo anonyme.

Avant de se lancer, l'amateur doit apprendre, exercer son regard, lire tout ce qu'il peut, déambuler dans les galeries, les salons et les salles de ventes. Ensuite seulement, il pourra se laisser porter par ses impressions pour passer à l'acte. Il n'est pas nécessaire d'avoir de gros moyens pour se constituer une collection cohérente d'au moins une trentaine de pièces.

Pour 200 à 300 euros, il est possible de trouver de très belles photos anonymes et de les mêler avec des épreuves de grands noms. "On peut ainsi acquérir des vues du Paris du XIXe siècle ou de la première moitié du XXe sans signature et les mixer avec une photo de la capitale par Atget ou Brassaï, achetées plusieurs milliers d'euros", préconise le couple. L'ensemble aura du sens.

Enfin, il faut bannir "le collectionnisme CAC 40" qui consiste à acheter en fonction des cotations et des recommandations de gestionnaires de patrimoine artistique dans l'espoir de réaliser un (éventuel) gain à la revente. En matière de photo, le meilleur conseiller reste le coeur du collectionneur et non son portefeuille.

"Misez en priorité sur les artistes en devenir"

Cécile Schall, directrice du salon Fotofever

Figure incontournable du monde de la photo, Cécile Schall se félicite du nombre croissant d'amateurs et de la bonne santé du marché qui voit certaines oeuvres flamber dans les ventes aux enchères. Elle conseille aux collectionneurs en herbe de "démarrer petit" et de s'intéresser en priorité à des artistes en devenir, dont les prix sont encore très accessibles (moins de 1 000 euros). Où les trouver ? Dans les galeries et en arpentant les grands salons.

Pour un néophyte, Paris Photo et Fotofever sont les endroits idéaux pour se confronter à l'incroyable diversité et à l'inventivité de la création contemporaine. Quant aux galeristes, ils lui feront découvrir les "poulains" qu'ils défendent. La collection étant un "acte de soutien à l'artiste, une affaire de rencontre avec lui", Cécile Schall réfute toute idée de placement-spéculation contrôlé par un conseil en art. "Il faut avant tout choisir ce que l'on aime, en prenant soin de privilégier les éditions limitées ou uniques." La plus-value, qui vient avec la reconnaissance des photographes, n'est qu'une cerise sur le gâteau. Parmi ceux qu'elle apprécie et dans lesquels elle croit, citons les Français Edouard Taufenbach (né en 1988) et ses photomontages ou Corinne Héraud (née en 1971) et son inspiration pictorialiste.

"Etre cohérent dans ses choix et vivre avec les oeuvres qu'on aime"

Nathalie Rossignol, collectionneuse avertie

Issue d'une lignée de collectionneurs appréciant le XVIIe et le XVIIIe siècle, Nathalie Rossignol est venue à la photo par curiosité intellectuelle, sa première passion étant la peinture. Dans les épreuves d'un artiste, elle cherche avant tout "la trace de sa créativité et de sa présence". C'est pourquoi, dans un premier temps, elle s'intéresse à Pierre et Gilles, un duo formé en 1976, ou à l'Américain David LaChapelle (né en 1963).

Depuis cinq ans maintenant, elle privilégie des photographes encore peu connus qu'elle accompagne dans leur parcours. C'est ainsi qu'elle suit avec enthousiasme le travail de Corinne Héraud, découverte à la galerie Courcelles Art Contemporain.

Pour cette experte, tout objectif de spéculation doit être écarté, car "c'est le plus sûr moyen de faire les mauvais choix". Son credo : bâtir une collection cohérente et vivre avec les oeuvres qu'on aime. Une ambition à la portée de (presque) toutes les bourses, un budget de 5 000 à 6 000 euros permettant de s'offrir des oeuvres exceptionnelles.

"N'achetez que de petites éditions pour la création contemporaine"

Elodie Morel, directrice du département photo de Christie's Paris

Pour cette spécialiste, le marché de la photo, malgré son succès, reste sain et éloigné de toute spéculation. A condition d'oublier la vingtaine d'enchères millionnaires pour privilégier des ventes plus accessibles, où il est possible de dénicher des tirages de très grande qualité pour moins de 10 000 euros.

Son conseil pour ne pas se tromper ? "Visez le qualitatif plutôt que le quantitatif et achetez des photos connues." Mieux vaut avoir une belle épreuve, certes plus chère, de la célèbre Rue Mouffetard (1954), d'Henri Cartier-Bresson (1908-2004), plutôt que l'une du même artiste, même très belle mais plus anonyme. Le raisonnement s'applique à Robert Doisneau (1912-1994) ou Willy Ronis (1910-2009).

Autre recommandation : n'acquérir que de petites éditions pour la création contemporaine. Au-delà de trente exemplaires, une photo ne sera, en effet, plus considérée comme une oeuvre d'art. Quant aux secteurs à cibler, la mode est très recherchée, les grandes expositions contribuant à augmenter la cote d'un photographe, comme ce fut le cas pour l'Américain Robert Mapplethorpe (1946-1989). Par ailleurs, si l'engouement pour le XIXe siècle et le début du XXe siècle s'est un peu tassé, on peut encore s'intéresser au mouvement pictorialiste ou à la photographie victorienne, notamment aux portraits de Julia Margaret Cameron (1815-1879).

Nos 5 paris pour démarrer (ou compléter) une collection

5 paris pour démarrer ou compléter une collection photo

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