Antoine d'Agata, corps et âmes face au virus

Série Virus - Antoine D'Agata - Agence Magnum  - Antoine d'Agata
Série Virus - Antoine D'Agata - Agence Magnum - Antoine d'Agata
Série Virus - Antoine D'Agata - Agence Magnum - Antoine d'Agata
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Prendre la température des vivants, c'est l'entreprise qui s'est imposée au photographe Antoine d'Agata pendant le confinement, et dont il nous livre le témoignage photographique bouleversant.

Avec

Trois couleurs, - l'ocre, le rouge et le noir - pour saisir le drame qui s'est joué et qui continue de se tenir derrière les murs des hôpitaux. Ces trois couleurs, et leurs infinies nuances, ce sont celles de la chaleur des corps, ceux des malades comme des soignants aux côtés desquels le photographe Antoine d'Agata s'est tenu de mars à mai 2020.  Face à l'expérience des limites, mais aussi face à ce virus invisible et partout, la caméra thermique lui a permis d'accéder aux choses "de l'intérieur". Avec " Virus ", Antoine d'Agata nous livre un témoignage d'une humanité sur le fil de la vie, d'un combat singulier où malades et soignants luttent face à l'invisible. Ce témoignage, " Virus",  composé de centaines de séries, vient de paraître aux éditions Studio Vortex. Le tout est aussi à découvrir à la Fondation Brownstone à Paris. Il en a réalisé un court-métrage, " La vie Nue ", pour l'Opéra national de Paris, à visionner en ligne.

Ma nécessité était de montrer quelque chose d'invisible, d'intangible. Je devais montrer la peur, l'appréhension, la douleur dans l'hôpital. L'appareil photographique classique ne peut les montrer. L'appareil photo thermique permet d'explorer d'autres niveaux de réalités, de photographier les êtres et les objets de l'intérieur. (Antoine d'Agata)

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Alternance d'errances le long des rues désertées, de banlieues pavillonnaires, au coeur d'un Paris rendu muet, son travail s'inscrit au plus près d'un traumatisme individuel et collectif loin d'être terminé. 

Plus qu'un objet, ce livre, c'est un geste; c'était important pour moi de le faire alors qu'on est encore sous le coup de l'épidémie. Le livre retrace jour après jour cette confrontation (Antoine d'Agata) 

Antoine d'Agata, qui photographie depuis 30 ans les " marges " avec lesquels il veut ne faire qu'un, revient à la caméra thermique pour la seconde fois. En 2015, après le Bataclan, il part à la rencontre des lieux de culte, une caméra thermique à la main. Sous la lentille thermique, les singularités s'effacent, ne reste que la vie des corps, autant de tâches de couleurs aux contours indécis. Photographe du flou, de l'indétermination des formes face à l'exigence de coller au plus près de l'expérience des limites, sa photographie atteint un niveau d'abstraction proche de la peinture

Dès le départ, l'essentiel pour moi n'était pas de regarder mais de vivre cette situation exceptionnelle que l'on a vécu. J'ai photographié pendant trois mois, tous les jours, sans exception. L'essentiel était de faire, de vivre, d'être à l'intérieur de la situation. Montrer, ce n'est pas accessoire mais cela arrive ensuite, c'est une conséquence. Avec le journalisme, on voyait ce qui se passait à l'hôpital, mais là, j'ai voulu des images relevant plutôt de l'ex voto, plus mystérieuses, de l'obscur. (Antoine d'Agata). 

Antoine d'Agata partage d'ailleurs avec le peintre Francis Bacon l'exploration des frontières, du faire corps avec leurs violences. Influencé par ce dernier, qu'il découvre pour la première fois au MoMa en 1989, leurs oeuvres respectives partagent cette recherche du mouvement des corps jusqu'à leur dislocation. De la rencontre de leur univers, un ouvrage vient de paraître, "Francis Bacon/ Antoine d'Agata, parallèle esthétique de deux oeuvres viscérales"  (éditions The Eyes, 2020).

J'ai toujours fait le choix de vivre la violence du monde plutôt que d'en être spectateur. (...) La peur et le désir sont les deux conditions primordiales à tous mes gestes, j'essaie d'aller au delà de l'un et de l'autre. (Antoine d'Agata) 

La Grande table idées
31 min

Extraits sonores: 

  • Nan Godin au micro de " Tam Tam etc". France Inter, 28.11.2003
  • Yannick Haenel au micro du " Réveil Culturel " 4.3.2019
  • Christine Salem et son nouveau titre "GEYRE" nouvel album MERSI sorti le 29 janvier 

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